Cette recension a préalablement été publiée dans la lettre n°14 BIS de la Commission Française d’Histoire Militaire en avril 2022. Nous partageons ce texte avec leur autorisation et celle de l’auteur, Alain J. ROUX.
Cette étude traite un sujet souvent évoqué, mais jamais étudié à fond. Le titre avec les guillemets annonce bien l’esprit de l’ouvrage et de l’auteur : la Commune de 1871 est à la fois sympathique et justifiée face aux Versaillais. Les Communards ont été des victimes malgré des fautes indiscutables ; enfin et surtout, les femmes sont des victimes sociales face à la misogynie des hommes de l’époque, qu’ils soient conservateurs ou révolutionnaires.
Cet ouvrage, écrit il y a 40 ans, est intéressant pour deux raisons : c’est un essai sociologique sur la condition féminine à la fin du Second Empire, et une tentative d’explication sur le mythe des « pétroleuses ». Edith Thomas utilise les sources assez nombreuses de toutes opinions sur le rôle et la place des femmes dans la Commune de 1871 à Paris. Elle ne cherche pas à cacher sa profonde sympathie pour les femmes actrices, volontaires ou non, des évènements de mars à mai 1871.
Les deux premiers chapitres traitent de la condition féminine sous le Second Empire et particulièrement de celle des femmes du peuple, pauvres et méprisées, y compris par les penseurs socialistes comme Proudhon. Si l’auteure manifeste sa sympathie pour Karl Marx, on peut observer qu’elle ne dit rien de la conduite de Marx envers sa propre servante qui finira au service d’Engels. Apparaît alors au fil du récit la figure de Louise Michel que l’on suit jusqu’à la fin de l’ouvrage. Ensuite du 18 mars à la fin de la Semaine sanglante, puis dans les prisons, apparaissent de nombreuses femmes, courageuses, ou plus simplement exaltées, mais toujours révoltées contre la condition injuste qu’elles subissent.
L’auteure fournit ainsi une étude sociologique que l’on trouve très rarement ailleurs, même si son objet est de démolir l’histoire officielle et de rétablir une certaine réalité : la condition misérable des femmes du peuple et, chose plus rare, la participation de bourgeoises et d’aristocrates aux tentatives de survie et d’éducation. Si l’objet du livre, la réalité des pétroleuses, est mis à mal, celui des incendies est évoqué d’une façon acceptable, avec toutefois quelques erreurs. Les études sur la Commune et sur certains de ses aspects ont beaucoup progressé depuis 1980 et quelques une des données numériques sont maintenant à peu près connues : le nombre de morts, par exemple, fut environ de 12 000 du côté des Communards.
Ce livre qui étudie un aspect important de la Commune est indiscutablement très orienté, mais il apporte des éléments méconnus des historiens non spécialisés, et contribue ainsi à l’étude de cette période.
Alain J. ROUX., membre de la Commission Française d’Histoire Militaire
Si vous avez aimé cet article, nous vous conseillons également :
Biblographie
THOMAS Edith, Les « Pétroleuses », Folio Histoire, Paris, 2021, 394 p.
Ce livre est excellent et fait tomber la légende qui a encadré ces femmes. Je conseille par ailleurs le livre que cette auteure à consacré à Rossel et qui est de très haut niveau