L’insurrection de Varsovie eut lieu du 1er août au 2 octobre 1944. La capitale polonaise se soulevait contre l’occupant allemand avant l’arrivée de l’armée soviétique afin de s’assurer d’une certaine marge de manœuvre politique.
Cette insurrection est très intéressante au niveau tactique pour deux raisons : l’industrie clandestine d’armement et l’utilisation d’équipements et d’uniformes adverses.

Wikimedia Commons
Pour compenser un net désavantage militaire, l’Armia Krajowa, l’armée de l’intérieur polonaise, avait, comme bon nombre de mouvements de résistance, un déficit en armes. Outre le marché noir, elle disposait de caches d’armes héritées de la défaite de 1939, des aides alliées et des prises faites sur l’ennemi. Mais cela ne pouvait suffire. Des ateliers clandestins ont donc été mis sur pied et œuvraient à la confection d’armes. Outre les grenades, quelques lance-flammes et des pistolets, l’une des armes confectionnées avec les moyens du bord pouvait conférer une certaine puissance de feu aux insurgés : le pistolet mitrailleur Błyskawica (éclair en polonais).
Celui-ci s’inspirait des stens britanniques et MP40 allemands. Quelques centaines d’armes furent employées lors de l’insurrection, nombre désuet, mais bienvenu. C’est cette arme qui est tenue par l’insurgé à droite sur la photographie. L’armement insurgé s’avéra donc hétéroclite, des armes allemandes côtoyant celles alliées et artisanales. Sur les 50 000 hommes et femmes de l’insurrection, moins de la moitié étaient armés.
Des véhicules furent aussi saisis. L’exemple le plus surprenant est celui de deux chars panthers qui permirent la libération d’un camp de concentration en périphérie de la ville.
Enfin, l’un des effets allemands les plus facilement reconnaissables sur cette photo est l’uniforme SS. Les insurgés parvinrent dans les premiers jours de l’insurrection à prendre un entrepôt contenant, entre autres, des uniformes des forces d’occupation. De nombreux membres de l’AK décidèrent donc de les porter. Ceux-ci leur permirent ainsi d’être uniformisés, à la manière d’une armée régulière et donc d’espérer échapper au peloton d’exécution, étant des partisans.
Mais un avantage non négligeable est à préciser : le port de l’uniforme ennemi, malgré le port du brassard rouge et blanc, couleurs de la Pologne, permit d’apporter la confusion dans les rangs de l’adversaire. En effet, pour peu que les conditions aient été adéquates, comme en pleine nuit par exemple, et si certains combattants polonais parlaient allemands, ce stratagème suffisait à passer les lignes ennemies en trompant les ennemis en faction, voir même à tendre des embuscades. Ce que l’on peut qualifier aujourd’hui de « false flag » fut donc particulièrement utile. De même, l’utilisation du réseau d’égouts permit aux insurgés de se déplacer discrètement, leur évitant les lignes ennemies, les bombardements et permirent aussi de lancer des assauts. Les sous-sols n’étaient néanmoins pas à l’abri de toutes menaces et ceux-ci comportaient nombre de dangers.
La résistance opiniâtre des Polonais ne suffit malheureusement pas à tenir en respect les troupes du IIIe Reich. D’autres raisons sont à noter : l’insuffisance de l’aide déployée par les Alliés[1] et le double jeu soviétique, marqué d’abord par un refus d’assistance, puis l’envoi dans des conditions désastreuses de quelques armes (sans parachutes). Il convient néanmoins de noter le sacrifice des équipages alliés et de plusieurs unités polonaises de l’armée de Sygmunt Berling qui traversèrent la Vistule pour aider leurs compatriotes, sans grand succès et en totale désobéissance aux ordres soviétiques.
Quand l’insurrection déposa les armes, Hitler accorda aux insurgés le statut de prisonniers de guerre, leur permettant d’échapper aux exécutions sommaires.
Le soulèvement de Varsovie coûta la vie à 17 000 insurgés et autant d’Allemands. Les pertes civiles s’élevèrent entre 150 et 250 000 habitants, de nombreux massacres et crimes de guerre étant perpétrés. La ville fut ravagée autant pendant qu’après les combats. Quand l’Armée Rouge s’en empara, plus de 80 % de celle-ci étaient en ruines, stigmates des affrontements et de l’occupation depuis 1939.
Si vous avez aimé cet article, nous vous conseillons également :
[1] Staline refusa l’utilisation des aérodromes soviétiques par l’aviation alliée dont les pertes devenaient insoutenables, pour parachuter des armes.