FORNI Pierre, Caracalla. Père de la citoyenneté universelle ?

Caracalla. Père de la citoyenneté universelle ? – Pierre FORNI

Cette recension a préalablement été publiée dans la lettre n°14 BIS de la Commission Française d’Histoire Militaire en avril 2022. Nous partageons ce texte avec leur autorisation et celle de l’auteur, Michel LOUSTAU.

Caracalla est connu du grand public (cultivé) pour deux raisons : ses nombreux bustes – peu flattés – et son édit de 212 accordant la citoyenneté romaine à tous les hommes libres de l’Empire romain. Lucius Septimius Bassianus est né à Lyon le 4 avril 188 de l’Africain Septime sévère et de la syrienne Julia Domna, et son surnom donné par les soldats évoque le manteau gaulois à capuche qu’il portait dans les camps. Après les assassinats de Commode (31 décembre 192) et de Pertinax (28 mars 193), les prétoriens, fait inouï, ont mis l’Empire aux enchères : Didius Julianus l’a emporté en leur promettant un donativum de 25 000 sesterces par homme. Proclamé empereur par les légions de Pannonie, de Mésie et de Dacie, Septime Sévère arrive à Rome le 9 juin 193. Soutenu par les 7000 vigiles, il chasse les prétoriens indignes et part en Orient triompher de Pescennius Niger, puis en Gaule vaincre Clodius Albinus près de Lyon le 19 février 197.

Comme son cadet Géta, l’enfant reçoit l’éducation de l’élite romaine : lettres classiques, éloquence, sport, chasse, exercices militaires. à l’instar de tous les grands Romains, il vénère Alexandre le Grand. Le 28 janvier 198, dans le palais du roi des Parthes à Ctésiphon, il devient Auguste et son frère César. En 202 il reçoit les honneurs du triomphe et épouse Plautilla, fille du tout-puissant préfet du prétoire Plautianus, qu’il fera tuer par ses affidés en 205. Septime Sévère meurt à Eburacum (York) le 4 février 211. La situation est inédite : deux frères empereurs qui se haïssent. Le 26 décembre, Caracalla tend un piège à Géta et le fait égorger par ses centurions dans les bras de leur mère inondée de sang[1]. Il aurait par ailleurs fait massacrer 20 000 personnes liées à son frère.

Sa personnalité est plus complexe que ne le dit le sénateur historien Dion Cassius, qui le peint en soudard débauché ennemi des honnêtes gens (les riches sénateurs) : très pieux, disciple du thaumaturge Apollonius de Tyane, bon orateur, il aime la cithare et la danse. Il continue l’œuvre des grands juristes stoïciens amis de son père par la Constitution Antonine qui donne le droit de cité romaine aux hommes libres de l’Empire, réalisant ainsi l’idéal d’Alexandre, une seule cité universelle (miapolis). Bienfaiteur des soldats, il augmente la solde (70 % du budget de l’état) et fait respecter les droits des petits paysans[2]. à Rome, les thermes de Caracalla font office de « palais du peuple ». Affecté d’une mystérieuse maladie (l’impuissance ?) guérie par Esculape à Pergame, il fait campagne en Orient et séjourne à Alexandrie. Les railleries des Grecs de la ville à son encontre le conduisent à ordonner un massacre de jeunes gens. Il bat les Parthes et profane les tombeaux de leurs rois, avant d’être assassiné près de Carrhes, le 8 avril 217, à l’instigation du préfet du prétoire Macrin, par le centurion Martialis.

Pierre Forni retrace l’histoire de Caracalla et de ses thermes en peinture et au cinéma (Fellini et la Dolce Vita) et montre la postérité de l’édit de 212 – « nationalité, citoyenneté, universalité », de l’Empire colonial français aux débats actuels[3]. Cette belle biographie est illustrée par 16 pages en couleurs et contient un glossaire, une chronologie, une bibliographie, une généalogie et un index.

Michel LOUSTAU secrétaire général de la Commission Française d’Histoire Militaire

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Bibliographie

FORNI Pierre, Caracalla. Père de la citoyenneté universelle ?, Paris, Ellipses, 2021, 350 p.


[1] FORNI Pierre, Caracalla. Père de la citoyenneté universelle ?, Paris, Ellipses, 2021, 350 p., pp. 103-104

[2] Ibid., pp. 159-161

[3] Ibid., pp. 272-284

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