Histoire de l’armée italienne

Histoire de l’armée italienne – Hubert HEYRIÈS

Cette recension a préalablement été publiée dans la lettre n°14 BIS de la Commission Française d’Histoire Militaire en avril 2022. Nous partageons ce texte avec leur autorisation et celle de l’auteur, LCL Vincent ARBARÉTIER.

Le professeur Hubert Heyriès qui vient de disparaître prématurément a laissé à la plupart d’entre nous le souvenir d’un professeur à la fois très érudit et très simple. Il fut également très altruiste, car il n’hésitait pas à aider de manière désintéressée les jeunes officiers chercheurs, dont nous étions, sur la masse de connaissances qu’il avait acquises avec le temps sur sa chère armée italienne.

Ce livre est devenu son succès posthume et mérite que l’on s’y attarde, car il a le grand avantage de traiter un sujet à la fois difficile et controversé, en France notamment, où nombre de militaires affichent encore une morgue peu méritée vis-à-vis de leurs frères d’armes transalpins. Cet ouvrage de 600 pages, notes et annexes comprises, reprend la genèse de l’histoire des armées italiennes depuis les temps précédant la réunification et fait bien, ce qui est rare dans la littérature française, la différence entre les régiments italiens issus de la tradition piémontaise, des autres issus de la tradition bourbonienne et napolitaine.

Les marine et forces aériennes sont également bien présentées avec ce même souci du détail constaté dans le cas de l’étude de l’armée de terre. La « croissance spectaculaire » de cette armée italienne destinée à la fois au maintien de l’ordre, à la conquête tardive d’un empire colonial et à la guerre européenne est montrée de manière très intéressante, et permet de comprendre à la fois la jeunesse, le manque d’expérience, mais aussi l’enthousiasme du soldat italien, lorsqu’il est bien commandé. Les grands chefs de cette armée, depuis le marquis de la Marmora en passant par Cadorna, Diaz, Badoglio et Messe, le dernier maréchal d’Italie sont aussi évoqués de manière très fine et très juste tout au long de cette étude.

Ces pages, ce qui est rare aujourd’hui, traitent également de l’armée contemporaine et expliquent comment l’armée italienne républicaine d’après-guerre se retrouve soumise aux influences des différentes loges maçonniques anticommunistes des années 60 et 70, au-moment où frappait le terrorisme des brigades rouges. Le seul bémol que nous pourrions trouver à ce livre porterait sur l’évolution de la place de l’armée italienne dans les différentes alliances des deux guerres mondiales et de l’après-guerre. Si la régénération de cette armée s’est faite de manière plus simple que celle de la Bundeswehr, il n’en reste pas moins que l’Italie est devenue entre-temps le porte avion américain en méditerranée et une plateforme logistique importante pour cette armée expéditionnaire en Europe. La participation concrète de l’armée italienne à l’EUROFOR de Florence créée au milieu des années 90 et de l’EUROMARFOR n’est pas évoquée, ainsi que le rôle que comptait jouer ce pays pour conduire la partie sud de l’effort européen de défense.

Malgré ces tout petits oublis, ce livre a eu le mérite d’inscrire dans la durée la référence en langue française sur l’histoire d’une armée méconnue et trop souvent méprisée par nos compatriotes. Bref, un très bon livre à mettre entre toutes les mains, d’historiens comme de militaires, ou de fanas des armées italiennes des différentes époques. Un apport scientifique qui complète harmonieusement les articles de militaria et de vulgarisation qui traitent habituellement de ce sujet. On espère que les éditions pourront ainsi traiter d’autres armées d’une manière aussi synthétique et scientifique.

Lieutenant-Colonel Vincent ARBARÉTIER, administrateur de la Commission Française d’Histoire Militaire

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Bibliographie :

HEYRIÈS Hubert, Histoire de l’armée italienne, Paris, Perrin, 2021, 596 p.

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