captain america

Ce que dit le héros de la société

Qu’est-ce qu’un héros et que représente-t-il ? Quel est le lien entre Achille et Captain America ? Le « héros » est une création qui reflète les contextes historiques, sociaux, économiques et avant tout politiques. Il donne sa vie pour une idéologie, qui nous permet d’étudier et comprendre le monde dans lequel il évolue. Depuis le début de la décennie 2010, on observe, par exemple, un débat sur la place des femmes dans les guerres. Cette évolution est visible dans la culture populaire : de nombreuses guerrières comme Lagertha ont un rôle important dans Vikings lancé en 2013, on observe la résurgence de super-héroïnes dans le cadre cinématographique – Wonder Woman, jouée par Gal Gadot, est le rôle principal de la superproduction de Patty Jenkins en 2017 –.

Les aventures de Steven Rogers, alias Captain America, inventées par deux américains de confession juive, Joe Simon et Jack Kirby, sortent pour la première fois en mars 1941. Voulant combattre le nazisme avec l’armée américaine, mais possédant un corps chétif, le soldat Rogers se soumet à une expérience scientifique pendant laquelle on lui injecte un sérum qui fait de lui un surhomme.

En 1941, les États-Unis entrent officiellement en guerre et le premier tome de Captain America paraît. Les mois de ces deux évènements ne coïncident pas : le premier numéro sort en mars, soit neuf mois avant que les États-Unis ne s’engagent dans les affrontements. Cela révèle un débat sur le sol américain et démontre la volonté des auteurs de convaincre une partie de la population américaine, empreinte de neutralité et parmi laquelle sévit un certain antisémitisme, de prendre parti contre l’Allemagne nazie dans ce conflit.

La couverture du premier numéro est révélatrice de cette volonté. Captain America habillé aux couleurs de l’Amérique (blanc, bleu, rouge et étoiles sur le drapeau) donne un crochet du droit à Hitler que l’on reconnaît à sa moustache et à un costume marron épinglé d’une croix gammée rouge sur le biceps droit. Tout au long de la guerre, Captain America est utilisé pour glorifier l’unité de son pays face au totalitarisme.

Le personnage de Captain America est porteur d’un enjeu politique et militaire : le comics est une critique de la société américaine – la guerre du Vietnam n’y est pas glorifiée, le Ku Klux Klan y est dénoncé –. Captain America œuvre pour une société cosmopolite comme le montre son alliance en 1969 avec le premier héros afro-américain, Samuel Wilson alias le Faucon.

Cette date concorde par ailleurs avec la guerre du Vietnam (1964-1975) et l’émancipation sociale et politique des afro-américains. Ces deux enjeux font émerger des débats et des fractures dans la société américaine. Si la guerre est dans un premier temps perçue comme une possibilité de progrès social pour une partie de la communauté noire américaine, elle est vivement critiquée dès les années 66. Malcom X, en 1966, et Martin Luther King, en 1967, montrent leurs fermes oppositions à cette guerre. Le premier la juge raciste et le deuxième accuse les États-Unis d’être devenu « le plus grand fournisseur de violence dans le monde d’aujourd’hui ».

La mort de Captain America apparaît comme le reflet d’une société profondément divisée, déjà mise en avant lors de son affrontement avec Iron Man, dans la série de comics Civil War, sur la question du recensement des super-héros. Cette disparition est en réalité une vive critique sur les attaques contre les libertés individuelles aux États-Unis. Captain America meurt en martyr, en héros qui se bat pour défendre ses idées politiques et militaires, raisons pour lesquelles il s’était engagé dans l’armée américaine.

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