Renversement du gouvernement de João Goulart, coup d'État de 1964

Armée et dictature : un Brésil sous emprise militaire (1964-1985)

En ce début de XXIᵉ siècle, la dictature brésilienne semblait avoir été reléguée dans les périodes oubliées de l’Histoire. Pourtant, avec l’arrivée au pouvoir du président Jair Bolsonaro en 2018[1], cette même dictature fait de nouveau parler d’elle. En effet, le président est un ancien officier et sympathisant assumé de la dictature[2]. Mais cette dernière reste souvent mal comprise et beaucoup de zones d’ombre subsistent, d’autant plus au sein du monde occidental pour qui cette période reste bien mystérieuse. C’est pourquoi nous avons souhaité revenir sur celle-ci avec un prisme bien particulier, celui du rôle de l’armée brésilienne. Car, en effet, cette dictature qui dura de 1964 à 1985 a mis l’armée au centre du jeu politique.

À partir des années trente, l’Amérique latine connaît des bouleversements politiques. De nouveaux types de régimes éclosent, mêlant militarisme et populisme. On peut, à ce titre, citer la présidence de Getùlio Vargas[3] au Brésil en 1930, la présidence Juan Perón en Argentine de 1946 à 1955, ou encore la très célèbre révolution cubaine qui débuta en 1953, précédée par le régime de Fulgencio Batista, lui aussi militaire[4]. Le contexte régional est donc relativement instable et oscille entre démocraties inachevées, révolutions et contre-révolutions.

Carte des élections présidentielles brésiliennes de 1930
Carte des élections présidentielles brésiliennes de 1930, 2021, XxPatriotaxX, Wikimedia Commons

Vargas en uniforme militaire accompagné de ses soutiens
Vargas en uniforme militaire accompagné de ses soutiens, auteur inconnu, 1930, Wikimedia Commons

Le contexte Brésilien après 1945

Avant 1964, un Brésil agité

Pressions internationales

Les pressions internationales sont nombreuses et remontent aux siècles précédents[5], en premier lieu celles émanant de la part des États-Unis. Ces derniers considèrent à l’époque l’Amérique latine, le Brésil compris, comme leur chasse gardée. Ils y déploient des forces diplomatiques et militaires, comme à Cuba[6] ou encore au Panama. Avec la guerre froide, cette influence s’accroît nettement par peur d’une subversion des « rouges »[7]. Fantasmée ou réelle, cette influence communiste pousse les États-Unis à financer des régimes dictatoriaux farouchement anti-communistes[8]. Après l’accession au pouvoir de Fidel Castro à Cuba, les États-Unis accroissent leurs aides militaires, financières et diplomatiques.

L’École supérieure de guerre de Rio est alors créée, basée sur le modèle états-unien. Cette école forme tous les futurs cadres de l’armée brésilienne. Les envoyés des États-Unis aident alors non seulement à former les armées, mais fournissent aussi du matériel et des conseillers. Certains officiers et soldats brésiliens combattent même aux côtés des alliés durant la fin de la Seconde Guerre mondiale, en Italie notamment (25 000 soldats).

D’autres pays marquent également l’Amérique latine de leur influence : la France joue un rôle important sur le plan des idées, spécifiquement avec ses théoriciens militaires et la notion de contre-révolution. C’est particulièrement le cas durant l’entre-deux-guerres, où des missions de formation sont même entreprises[9]; mais aussi pendant et après la guerre d’Indochine, sur le plan de la pensée où ces théories contre-révolutionnaires foisonnent parmi les militaires du haut du rang. Cela donne matière à l’armée, aux anti-communistes en premier lieu, pour lutter contre un ennemi intérieur, souvent fantasmé. Des militaires français, comme Roger Trinquier[10] ou Charles Lacheroy[11], servaient fréquemment de base idéologique aux armées sud-américaines, le Brésil ne faisant pas exception.

Toutefois, cette influence française reste marginale comparativement à celle, grandissante, des États-Unis. Il faut néanmoins se garder de voir l’Amérique du Sud comme un unique terrain de jeu de la CIA ou d’une quelconque institution à la solde des États-Unis, car bien que réelles, ces influences ne doivent pas nous faire oublier le contexte proprement brésilien.

Politique brésilienne avant 1964

Le Brésil des années soixante peut être résumé en un mot : l’agitation. C’est un pays bousculé par les syndicats, les mouvements sociaux et la poussée de la gauche qui progresse dans les urnes. Une partie des conservateurs, des bourgeois, de l’Église et des classes moyennes craint alors une subversion communiste. Cette crainte est, par ailleurs, largement appuyée par la presse lorsque le président João Goulart arrive au pouvoir en 1961. Beaucoup gardent le souvenir d’un président précédent, Getulio Vargas, élu par deux fois en 1930 et 1961.

Visite du président Vargas dans une école de Porto Velho
Visite du président Vargas dans une école de Porto Velho, auteur inconnu, 1940, Wikimedia Commons

Vargas était un président qui avait renversé l’ancienne république dite « Vieille République »[12]. Fer de lance des réformes sociales et de la nationalisation des ressources pétrolières, il reste très aimé dans les milieux socialistes et communistes. En revanche, il est abhorré par une partie de la population, plus conservatrice. C’est cette pression des milieux plus conservateurs qui le pousse à se suicider en 1954.

Le nouveau président, João Goulart[13], est loin d’être communiste, mais sa sympathie pour la gauche déplait. Par ailleurs, il reste l’ancien vice-président ayant exercé sous Vargas et rappelle la période de cette présidence à bon nombre de Brésiliens. Cela lui confère l’étoffe d’un ennemi public pour des milieux conservateurs, mais aussi en dehors du pays. Les États-Unis financent l’opposition aux élections législatives de 1962 par peur d’un Brésil communiste.

Cet état d’esprit est appuyé par une certaine vision conservatrice de la démocratie brésilienne. Elle est vue comme une démocratie molle, sujette aux compromis et aux élites clientélistes. C’est ce qui pousse l’armée à sortir peu à peu des casernes pour investir le terrain politique.

Coup d’État de 1964 et rôle de l’armée

L’état d’esprit de l’armée

Il faut rappeler que l’armée brésilienne, comme toute institution, dispose de valeurs, d’opinions et de croyances qui lui sont propres. C’est cette culture de l’armée qui la pousse à agir. La première de ces croyances est l’idée que l’armée se perçoit comme une institution au-dessus des divisions politiques, au-dessus de tout clivage. L’institution militaire se voit et est perçue comme le garant principal de la stabilité du pays. Dès lors, elle se pose, au début des années soixante, comme l’anti-modèle du gouvernement Goulart, ce qui est à l’origine du renversement militaire qui suit. Les militaires souhaitent que l’armée soit un modèle contre la corruption, contre la dérive communiste et contre la déperdition des valeurs. Des attributs qui sont, à cette époque, donnés au gouvernement Goulart par une partie des hauts gradés.

Cet esprit naissant dans l’armée justifie le coup d’État, qui est réalisé grâce à l’aide d’une partie non négligeable de la population[14]. En effet, dès 1963, des manifestations anti-communistes éclatent, preuve pour les militaires du soutien de la population. On retrouve d’ailleurs cet esprit dans le texte fondateur de la « révolution »[15], écrit par les généraux: « La révolution victorieuse s’investit de l’exercice du Pouvoir Constituant. Celui-ci se manifeste par l’élection populaire ou par la révolution. C’est la forme la plus radicale du Pouvoir Constituant… Les chefs de la révolution victorieuse, grâce à l’action des Forces Armées et à l’appui sans équivoque de la Nation, représentent le Peuple et en son nom exercent le Pouvoir Constituant, duquel le Peuple est l’unique titulaire »[16].

L’historien Carlos Fico, spécialiste du Brésil contemporain, parle d’un dénominateur commun propre à l’armée. Il l’appelle « l’utopie autoritaire ». Cette utopie est la croyance en la nécessité d’un État fort pour éliminer les obstacles à la grandeur brésilienne[17]. Le communisme constituant la menace la plus importante, la corruption suivant avec le désordre.

C’est donc avec ce lot de croyances, de valeurs et de pensée que l’armée se meut pour sortir des casernes.

Soutien de l’armée

Si l’armée joue le rôle central, il faut toutefois insister sur le fait que le coup d’État n’est pas strictement militaire, et que le soutien de la population n’est pas uniquement fantasmé ou un prétexte pour intervenir. À ce titre, les historiens de la période comme Maud Chirio parlent plutôt d’un renversement civilo-militaire en raison d’un appui affirmé d’une part du peuple et des institutions. À ce titre, une partie des habitants voient aussi l’armée comme gardienne d’une « brasilidade »[18] (brasilianité) face aux « dérives idéologiques ». C’est le cas de l’Église qui soutient, dans un premier temps, le coup d’État, même si elle s’en détourne par la suite. Elle voit l’armée comme protectrice de la chrétienté face à la montée d’un communisme athée et vu comme profanateur.

Les classes moyennes sont également un soutien important, car elles partagent le constat d’une corruption endémique accablant le pays. Enfin, une partie des médias vient confirmer ce constat de coup civilo-militaire en appelant plus ou moins directement à renverser le gouvernement Goulart. On peut noter que ce soutien à l’armée est assuré : ce n’est donc pas uniquement un appui affirmé a posteriori par les putschistes. Comme le note l’historien Carlos Fico, « le mouvement bénéficie d’un important soutien civil et il est loin de sortir des seules casernes »[19].

31 mars 1964, le début de la dictature

Le 31 mars 1964, de nombreux militaires pensent que Goulart souhaite tenter de se maintenir au pouvoir par un coup d’État. Des révoltes locales commencent à éclater, comme le 13 mars à Rio de Janeiro. Les manifestants gardent en tête le souvenir de 1935 où le Parti communiste brésilien (PCB) a tenté un coup militaire sans succès.

Soutenus par une partie de la population, les généraux décident de lancer le coup d’État, aussi appelé révolution ou contre-révolution. Ce sont principalement les officiers et généraux de haut rang qui le mènent, avec un soutien plus ou moins assuré des simples soldats. Le chef d’état-major Castelo Branco prend la tête du mouvement, mais c’est d’abord le général Olímpio Mourão Filho[20] qui dirige l’initiative militaire en marchant ce 31 mars 1964 sur Rio de Janeiro, ville la plus importante du pays. Le président Goulart est démis de ses fonctions et remplacé par les militaires putschistes. Les États-Unis viennent rapidement apporter leur soutien financier et militaire avec des livraisons d’armes à travers l’ambassadeur de l’époque, Lincoln Gordon : c’est l’opération Brother Sam. Des navires états-uniens sont, par ailleurs, disposés à intervenir en cas d’opposition au putsch.

Le président et putschiste Castelo Branco
Le président et putschiste Castelo Branco, Gouvernement du Brésil, 1964, Galeria de Presidente, Wikimedia Commons

Il faut néanmoins souligner que la dimension putschiste n’est pas strictement nouvelle puisque l’armée a déjà participé à des renversements[21]. En revanche, ce qui est nouveau, c’est que l’armée ne rend pas le pouvoir après son accession à la tête du pays. Le 2 avril 1964, Auro de Moura Andrade, qui préside alors le Sénat, déclare la présidence du Brésil vacante.

L’exercice du pouvoir militaire, 1964-1985

Le rôle de l’armée dans la politique sous la dictature

C’est Castelo Branco[22] qui prend la tête du pays le 15 avril 1964 par un vote accordé par le Sénat. Il dissout les partis politiques sans toutefois abolir toute forme de démocratie. Très vite, les militaires s’empressent de maquiller ce coup d’État en le faisant passer pour légaliste, celui-ci n’aurait répondu qu’à la violation de la constitution par le président Goulart.

Renversement du gouvernement de João Goulart, coup d'État de 1964
Renversement du gouvernement de João Goulart, coup d’État de 1964, auteur inconnu, 1964, Archives nationales brésiliennes, Wikimedia Commons

Une succession d’actes institutionnels[23] est écrite pendant la dictature. Ce sont ces actes qui constituent les grandes lignes de la gouvernance du nouveau pouvoir militaire, et les militaires gouvernent par décrets pour donner un camouflage démocratique au nouveau régime. Le premier acte institutionnel vient poser l’armée comme représentante de la volonté populaire. Ainsi, les militaires légitiment le coup d’État rapidement pour atténuer toute contestation. Le second vient, quant à lui, instaurer un bipartisme entre le parti des militaires putschistes (ARENA) et le parti de l’opposition (MDB).

Cependant, on voit apparaître des divergences chez les militaires, plus particulièrement dans la conduite de la politique. Si bien qu’une opposition se dessine dans leurs rangs : les militaires sont alors partagés, certains étant partisans d’une ligne « douce », en gardant une certaine forme de démocratie, bien qu’amputée ; tandis que d’ autres réclament une ligne plus dure où la « brasilianité »[24] est mise en avant, la torture systématique, et les opposants traqués durement.

Les officiers plus jeunes, lieutenants, capitaines, majors et colonels, sont assez sensibles à cette dernière. Ils sont souvent relégués au second plan, ne prenant pas part aux décisions et agissant plus comme spectateurs. Cette démobilisation politique forcée les amène à se rebeller en réclamant des mesures répressives et un durcissement du régime. L’armée ne peut donc pas être décrite comme une institution homogène, car plusieurs visions y cohabitent.

Dès 1969 les mesures répressives s’intensifient, la ligne dure triomphe et plusieurs signes montrent une évolution notable de la politique. Le régime veut anéantir la gauche dans le pays. Les années suivantes sont décrites comme les « années de plomb »brésiliennes[25]. Les figures ayant été favorables – ou suspectées d’être favorables – à une quelconque politique de gauche[26] sont alors évincées et remplacées par des figures nouvelles, plus encline à adhérer au régime. Ainsi, pour certains qui accèdent rapidement à une rétribution financière ou symbolique, la dictature est une opportunité. Cela peut permettre d’expliquer la pérennité certaine du régime.

Les mesures policières se multiplient et la contestation est écrasée. En 1968, face à une grève étudiante massive, le gouvernement lance une série d’arrestations arbitraires[27]. Ces contestations sont un des prétextes utilisés par le régime pour conserver l’ordre public avec des mesures violentes.

C’est d’ailleurs à la suite de ces contestations que le régime évolue drastiquement. L’acte institutionnel numéro cinq est émis par le président Costa e Silva : il suspend la Constitution et confère au président des pouvoirs dictatoriaux.

Armée et économie sous le régime militaire

Le rôle des technocrates libéraux

Dès le début de la dictature, on retrouve dans les sphères de gouvernance beaucoup de technocrates. L’économie a été une pierre angulaire de la politique menée par les généraux Brésiliens, et c’est particulièrement vrai en ce qui concerne l’économie, entendue ici comme une science. Roberto Campos, ministre de la planification économique de 1964 à 1967, était un de ces conseillers, l’un de ceux qui eurent une influence notable en tant qu’économiste pendant le régime. Ainsi, l’armée n’a jamais gouverné seule, mais s’est entourée de personnalités, souvent conservatrices, pour appuyer et légitimer sa politique.

Roberto Campos, économiste brésilien proche du régime
Roberto Campos, économiste brésilien proche du régime, auteur inconnu, 2015, Wikimedia Commons

Ces mesures économiques étant libérales, elles avaient/attiraient la faveur des États-Unis dans un premier temps[28]. Ainsi, le régime militaire brésilien a toujours su garder des liens forts avec les États-Unis, avant, pendant et après le coup d’État.

Ces politiques libérales servaient également un autre but politique, celui d’assurer la continuité avec les précédents présidents. En effet, ces politiques n’étaient pas nouvelles au Brésil et rappelaient donc le lien qu’il pouvait y avoir entre l’avant et l’après 1964. De plus, mettre l’économie en avant plutôt que la politique est également une manière pour les militaires de faire passer leur programme comme neutre et honnête, dépourvu de tout partisanisme.

Ensuite, les politiques économiques deviennent autoritaires, l’État intervient dans l’économie dans une large mesure avec le tournant autoritaire. Les libéraux sont alors congédiés et c’est un professeur de Sao Paulo, Delfim Netto, qui prend la relève comme ministre des Finances. Par ailleurs, on lui attribue le miracle économique brésilien.

Le miracle économique brésilien

Si l’on parle souvent du Chili lorsqu’on aborde les succès économiques des dictatures, on oublie souvent que le même phénomène s’est produit au Brésil.

L’inflation, problème majeur jusqu’alors, se réduit drastiquement[29] : de 92 % en 1964, elle passe à 28 % en 1967. L’année 1968 marque le début d’une forte croissance avec près de 11 % en moyenne durant six ans. Ces années soixante sont vues comme un âge d’or de la dictature où l’économie prospère, à défaut de la liberté politique.

Cela ne doit pas faire oublier que, sous la dictature, de nombreuses zones sont délaissées et restent très pauvres. C’est particulièrement le cas des régions éloignées des grands centres urbains comme Rio de Janeiro, São Paulo ou la nouvelle capitale Brasília.

Culture et dictature

L’armée brésilienne s’est aussi illustrée dans le domaine de la culture

La mise en scène du pouvoir

Sous la dictature, la culture passe par la célébration de la « brasilianité »[30]. Le pouvoir ne ménage pas les moyens pour montrer la grandeur du Brésil à travers de nombreuses commémorations et de multiples fêtes.

D’abord, avec la conservation des célébrations de l’avant dictature afin de garder cette façade démocratique que nous avons évoqué, mais aussi avec la création de nouvelles fêtes. L’Historia Pátria[31] est mise à l’ordre du jour par les généraux et célèbre une certaine forme d’optimisme concernant un peuple unique et grand.

En 1969, on voit apparaître une véritable stratégie d’exhibition des emblèmes de la patrie. Celle-ci est menée par le régime pour renforcer le pouvoir, et l’attachement des citoyens aux valeurs chères à l’armée.

On peut alors citer de multiples exemples :

  • 1969 avec la campagne « un drapeau dans chaque salle de classe » ;
  • 1971 avec la loi 5 700 qui indique les conditions d’utilisation du drapeau ainsi que de l’hymne brésilien ;
  • 1971 avec l’inauguration du « Monument au drapeau », structure massive surmontée d’un drapeau brésilien ;
  • 1972 avec le Sesquicentenário[32], immense célébration du cent cinquantième anniversaire de l’Indépendance.
Célébration du sesquicentenário de 1972
Célébration du sesquicentenário de 1972, auteur inconnu, 1972, SIAN, Wikimedia Commons

Ainsi, la dictature militaire brésilienne ne fait pas exception, le régime instaurant une véritable mise en scène du pouvoir et de ses attaches, éléments que l’on retrouve dans bon nombre de dictatures à cette époque, en Espagne et en Amérique en particulier.

Culture musicale sous la dictature

Le Brésil des années militaires n’est cependant pas complètement verrouillé et contrôlé. Si l’on trouve des sujets proscrits, tels que la critique du pouvoir politique, une certaine forme d’expression artistique subsiste[33]. Cela peut être illustré par la popularité au Brésil et dans le monde du Bossa Nova[34], croisement entre jazz et samba. Le mouvement est popularisé bien avant le coup d’État, mais il est remanié sous la dictature pour mieux correspondre aux réalités politiques. Il reste très populaire malgré l’instauration du régime militaire.

Un autre mouvement témoigne de la continuité culturelle au Brésil : le Tropicália (Tropicalisme). Né à la fin des années soixante, c’est un courant qui est, quant à lui, créé sous la dictature. Il adapte les tendances hippies des années soixante-dix en les alliant à la tradition brésilienne.

Caetano Veloso, fondateur du tropicalisme
Caetano Veloso, fondateur du tropicalisme, auteur inconnu, 1967, Archives nationales brésiliennes, Wikimedia Commons

Mais les difficultés rencontrées et les censures régulières connues par les artistes doivent nous rappeler que la culture restait noyautée par le pouvoir politique.

L’influence de la télévision

La télévision a été une révolution dans le monde entier, et son avènement au Brésil coïncide avec la période militaire. En 1986, lors de la fin de la dictature, c’était plus de 26 millions de postes de télévisions qui étaient présents dans le pays. On comprend alors aisément que la télévision fut un formidable outil de communication pour les généraux qui purent de facto contrôler le discours public[35].

La télévision brésilienne était une des plus imposantes au monde, que ce soit en termes de visionnage ou d’infrastructures. Elle proposait des programmes légers aux finalités politiques pour les 80 millions de téléspectateurs. Mais ces productions n’étaient pas uniquement destinées au Brésil puisqu’elles furent exportées et distribuées dans le monde entier, ce qui satisfaisait grandement les militaires et les civils se souciant de la supposée perte de moralité d’une part de la société.

La fin de l’ère militaire

Le déverrouillage de la gouvernance

L’adoucissement de la dictature

Durant les années soixante-dix, on assiste à un mouvement de démocratisation progressive.

Le pouvoir politique accorde, en effet, de plus en plus de libertés, car ce sont en partie les militaires qui décident ce tournant, bien qu’influencés par la société civile comme on le verra par la suite.

Ernesto Geisel[36], président à partir de 1974, marque le retour des modérés au pouvoir après près d’une décennie dominée par la ligne dure. Il permet une relâche de la censure, ce qui fait renaître l’opposition politique. Il faut cependant nuancer : le mouvement reste assez limité. Mais certains hommes d’affaires de São Paulo, capitale économique, commencent à appeler à un retour à la démocratie, et les ouvriers métallurgiques lancent des grèves spontanées face aux politiques salariales menées par la dictature[37]. Jusqu’à la fin de la présidence en 1979, le pouvoir civil s’érige en une véritable opposition.

La torture systémique est de plus en plus décriée, même au sein des jeunes officiers, soucieux de conserver une bonne image au sein de la société civile. Les histoires de torture commencent à être entendues et à entacher le régime entier. Il convient tout de même de noter que cette torture, bien que tristement réelle, n’a rien de comparable dans son ampleur avec celle pratiquée dans les dictatures voisines, comme mentionné auparavant.

On estime le nombre de morts à 434 sur toute la période de la dictature, contre près de 30 000 en Argentine par exemple, ce qui en fait un exemple atypique car moins meurtrier que ses voisins Sud-Américains. Toutefois, il ne s’agit ici que des morts et disparus et ce chiffre ne prend pas en compte les victimes indirectes. Mais cette torture n’en reste pas moins très marquante au sein de la société. La ligne dure devient dès lors marginale, au sein de l’armée particulièrement.

La catastrophe économique

On peut également noter le rôle de la situation économique dans la chute du régime. Si l’on a parlé de miracle brésilien auparavant, il faut noter que ce dernier est éphémère. En réalité, la situation économique fluctue beaucoup pendant la dictature, suivant notamment les courants de l’économie mondiale.

Dès 1974, l’inflation remonte en flèche et devient gigantesque à la fin du régime avec plus de 200 % en 1985[38]. Cela engendre une grande pauvreté dans les zones reculées du Brésil, faisant émerger une contestation d’ampleur et isolant le pouvoir politique encore un peu plus.

La crise économique causée par l’inflation, la crise de la dette publique et un déficit commercial grandissant accentuent le ras-le-bol de la dictature parmi les civils et les militaires du rang. L’inflation atteint son pic en 1988, soit trois ans après la fin du régime militaire[39].

L’inflation brésilienne entre 1950 et 1997
L’inflation brésilienne entre 1950 et 1997, MyNameIsBIFF, 2010, Wikimedia Commons

Les mouvements contestataires

Les mouvements contestataires n’ont jamais cessé d’exister sous la dictature.

Ces derniers étaient composés de citoyens ordinaires, de militants politiques, de défenseurs des droits humains et d’artistes qui se sont unis pour lutter contre la répression, la torture et les violations des droits fondamentaux perpétrées par le régime. La contestation s’est exprimée de différentes manières, notamment à travers des manifestations publiques, des grèves, des sit-in et des concerts de protestation. Les militants ont également organisé des campagnes de sensibilisation pour informer le public sur les abus commis par le régime, et ont formé des réseaux pour aider les prisonniers politiques et leurs familles.

De nombreuses contestations civiles émergent alors. Les étudiants à Rio en 1968 mènent une grève qui fut particulièrement importante. Les affrontements avec la police provoquent la mort d’au moins un manifestant, ce qui pousse la jeunesse de Rio à manifester dans la rue avec le cortège funéraire. En 1968, c’est également de la part du député Márcio Moreira Alves que la contestation émerge, lorsqu’ il appelle à boycotter la fête nationale de l’indépendance, puis est contraint de s’exiler. Mais lors des débuts de la dictature, ces contestations étaient plutôt locales et disparates.

Dès la promulgation de l’acte numéro 5 instaurant la dictature, des guérillas se forment dans le pays, marxistes pour certaines, nationalistes pour d’autres[40]. Ces mouvements mènent des actions disparates, comme on peut en trouver en Europe à cette époque avec les brigades rouges par exemple. Le mouvement insurrectionnel marxiste du MR-8 kidnappe l’ambassadeur américain Burke Elbrick en 1969 pour l’échanger avec des prisonniers du régime. Mais les mouvements armés, traqués par le pouvoir, s’essoufflent et perdent en vigueur.

De nombreuses personnes s’exilent : en premier lieu les opposants mais aussi les artistes, les intellectuels et les chercheurs.

À la fin des années soixante-dix, on retrouve des mouvements bien plus massifs qui font renaître une opposition nette. Ces mouvements sont encouragés par la démocratisation progressive du régime et l’adoucissement de la censure. D’anciens soutiens du gouvernement rejoignent l’opposition, comme une part importante du clergé brésilien.

Finalement, la pression exercée par les mouvements contestataires a contribué à la fin de la dictature en 1985 et à la restauration de la démocratie au Brésil.

La fin de la gouvernance de l’armée

La présidence du général João Figueiredo (1979-1985), dernière de la dictature, est l’une des plus impopulaires dans l’histoire brésilienne. Sa politique est marquée par un certain degré de libéralisation politique[41], après des années de répression sévère sous les autres présidences.

Toutefois, il convient de noter qu’il continue également de réprimer les opposants politiques et de protéger les militaires impliqués dans les violations graves des droits de l’homme pendant la dictature. Ses réformes économiques entraînent également une augmentation de l’inégalité économique et exacerbent les problèmes sociaux existant au Brésil[42].

Le régime militaire lâche ainsi prise et prépare l’après-dictature. En 1979, une loi mémorielle sur l’amnistie est votée pour permettre d’éviter les poursuites contre les militaires et les policiers, mais aussi contre les opposants qui ont pris les armes contre le régime. Cette loi, qui réconcilie en apparence les opposants avec les militaires, enterre la question mémorielle de la dictature. La loi a été critiquée pour avoir protégé les coupables de violations graves des droits de l’homme et pour avoir empêché la justice pour les victimes[43].

En 1982, les élections représentent alors un tournant plus significatif qui accentue le déclin de la dictature des généraux. L’armée perd pied avec une opposition renforcée qui obtient alors la majorité à la Chambre des députés et dans les États clés brésiliens avec des gouverneurs contestataires.

En mars 1983, Dante de Oliveira, opposant et député du Mouvement démocratique brésilien, propose devant le Congrès brésilien le rétablissement de l’élection du président au suffrage universel direct. De nombreux brésiliens sortent dans les rues pour soutenir le mouvement, comme les 1,5 million de participants à Sao Paulo.

Voyant qu’il perd le contrôle, le général Figueiredo fait voter l’état de siège et empêche les manifestations. Échec cuisant, car les manifestants organisent une campagne autour du congrès pour klaxonner pendant le vote. Furieux, le général se couvre de ridicule en sortant pour frapper les voitures avec sa cravache. Cette scène, passée à la postérité, symbolise aux yeux des observateurs internationaux, et particulièrement des États-Unis, la perte de pouvoir de l’armée et des généraux, et la démocratisation progressive du Brésil.

En 1985, après vingt ans de gouvernance militaire au Brésil, les autorités militaires cèdent le pouvoir à un gouvernement civil. C’est ainsi que des élections libres sont rétablies en 1985 avec l’élection de Tancredo Neves[44]. On peut ainsi dire que ce rétablissement, à l’instar du coup d’État, est à la fois militaire et civil. Cependant, la transition vers un système politique plus démocratique est difficile, car les réformes économiques et politiques nécessaires pour établir une démocratie durable sont mises en place assez lentement.

Malgré les difficultés, la fin de la gouvernance militaire en 1985 est un moment clé de l’histoire du Brésil, marquant le début d’une nouvelle ère de liberté et de démocratie pour le pays. L’armée brésilienne cesse alors d’occuper une place prépondérante en politique pour retourner dans les casernes avec un rôle strictement militaire[45].

Portrait du premier président post-dictature, José Sarney
Portrait du premier président post-dictature, José Sarney, auteur inconnu, 1985, Wikimedia Commons

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Bibliographie

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ROGELIO SUPO Hugo, « Les enjeux français au Brésil pendant l’entre-deux-guerres : la mission militaire,(1919-1940) », dans Guerres mondiales et conflits contemporains, n°215, Paris, Presses universitaires de France, 2004, 140 p., pp. 3-24, [en ligne] https://www.cairn.info/revue-guerres-mondiales-et-conflits-contemporains-2004-3-page-3.htm (dernière consultation le 20/02/2023)


[1] Bolsonaro est investi le 1er janvier 2019 et dirige jusqu’au 1er janvier 2023, date à laquelle le nouveau président Lula prend sa place à la tête du Brésil, qu’il gouverne encore aujourd’hui.

[2] En 2016, il déclare par exemple devant les auditeurs de Radio Jovem Pan : « L’erreur de la dictature a été de torturer sans tuer. », rapporté par LAGARDE Yann et RENARD Camille, « Brésil : la nostalgie de la dictature ou l’hommage au tortionnaire Brilhante Ustra », dans France Culture, Paris, Société Nationale de Radiodiffusion Radio France, 2018, [en ligne] https://www.radiofrance.fr/franceculture/bresil-la-nostalgie-de-la-dictature-ou-l-hommage-au-tortionnaire-brilhante-ustra-4276883 (dernière consultation le 20/02/2023)

[3] Malgré sa défaite aux élections contre le conservateur Prestes, Vargas dirige le pays de 1930 à 1945 après un coup d’État, ce qui laisse un souvenir durable et amer à une partie de la population conservatrice.

[4] Si l’on parle beaucoup dans l’historiographie moderne des régimes militaires sud-américains après la Seconde Guerre mondiale, il ne faut pas pour autant oublier que ces régimes débutent dans les années 1930.

[5] L’Amérique du Sud et l’Amérique latine ont longtemps été des terrains pour les puissances coloniales: l’Espagne et le Portugal en particulier, mais le XXe siècle a été marqué par un rôle accru des États-Unis dans la région.

[6] Les États-Unis interviennent à Cuba depuis 1898, d’abord pour aider contre l’Espagne, puis pour asseoir leurs positions politiques et économiques.

[7] En d’autres termes, des forces communistes supposées ou réelles.

[8] GRANJON Marie-Christine, « Les interventions des Etats-Unis en Amérique centrale (1885-1980) : le poids du passé », dans Politique étrangère, vol. 47, n°2, Paris, IFRI, 1982, pp. 269-536, pp. 297-308, [en ligne] https://www.persee.fr/doc/polit_0032-342x_1982_num_47_2_3129 (dernière consultation le 20/02/2023)

[9] PACHECO BORGES Vavy, « Des Français observent les Brésiliens : la correspondance diplomatique française (1930-1937) », dans Revue historique, n°596, Paris, Presses universitaires de France, 1995, 125 p., pp. 307-326, [en ligne] https://www.jstor.org/stable/40955924?seq=2 (dernière consultation le 28/02/2023)

[10] Trinquier est un officier parachutiste français ayant opéré pendant la guerre d’Indochine et ayant théorisé la chose militaire.

[11] Lacheroy est un colonel français. Après son expérience en Indochine, il a développé une théorie sur la guerre révolutionnaire.

[12] La República Velha, littéralement « Vieille République», était le nom donné a posteriori aux États-Unis du Brésil de 1889 à 1930.

[13] Goulart est président de 1961 jusqu’en 1964, date à laquelle il est renversé par le coup militaire. Il est apprécié par les socialistes mais rappelle le coup d’État de Vargas dont il est le successeur.

[14] CHIRIO Maud, « La politique des militaires, 1961-1978 : mobilisations et révoltes d’officiers sous la dictature brésilienne », dans Bulletin de l’Institut Pierre Renouvin, n°33, Paris, IRICE, 2011, 152 p., pp. 109-113, [en ligne] https://www.cairn.info/revue-bulletin-de-l-institut-pierre-renouvin1-2011-1-page-109.htm (dernière consultation le 20/02/2023)

[15] Le terme contre-révolution est utilisé par les généraux eux-mêmes. Dans cette perspective, la révolution serait celle menée par Goulart et les forces de gauche, tandis que la contre-révolution viendrait rétablir un ordre précédant cette révolution.

[16] Acte Institutionnel n°1, 09/04/1964 rapporté par CHIRIO Maud, « Le pouvoir en un mot : les militaires brésiliens et la “révolution” du 31 mars 1964 », dans Nuevo Mundo Mundo Nuevos, Paris, CERMA, 2007, [en ligne] https://journals.openedition.org/nuevomundo/3887?lang=pt (dernière consultation le 20/02/2023)

[17] Ibid.

[18] PEREIRA DE QUEIROZ Maria Isaura, « Identité culturelle et identité nationale au Brésil », dans SociologieS, Toulouse, AISLF, 1987, traduit par BONVIN François, [en ligne] https://journals.openedition.org/sociologies/2103?lang=en (dernière consultation le 20/02/2023)

[19] FICO Carlos, « La classe média brésilienne face au régime militaire : du soutien à la désaffection (1964-1985) », dans Vingtième Siècle. Revue d’histoire, n°105, Paris, Presses de Sciences Po, 304 p., pp. 155-168, [en ligne] https://www.cairn.info/revue-vingtieme-siecle-revue-d-histoire-2010-1-page-155.htm (dernière consultation le 25/02/2023)

[20] Olímpio Mourão Filho représente la ligne dure de l’armée brésilienne. C’est lui qui lance véritablement le coup d’État avec la prise de Rio, il fait alors partie du Mouvement intégraliste à tendance très conservatrice, voire fasciste.

[21] Notamment pendant la période de la « République Café au lait » entre 1889 et 1930 où le soutien de l’armée permet aux prétendants de s’assurer la présidence.

[22] Castelo Branco est le premier des cinq généraux ayant exercé sous la dictature. Il préside de 1964 à 1967.

[23] De 1964 à 1969, dix-sept actes institutionnels sont promulgués pour régler la vie des Brésiliens et donner les lignes directrices. Ils sont appuyés par les 104 décrets-lois permettant de contourner toute forme de démocratie sans assumer pleinement le caractère dictatorial du régime.

[24] La brasilianité est un terme faisant référence à la croyance supposée en un caractère unique et national brésilien doté de traits plus ou moins immuables constituants l’identité du peuple brésilien (langue, mœurs, traditions…).

[25] La troisième présidence d’Emílio Garrastazu Médici représente cette période de répression intense. Elle dure de 1969 à 1974 et fait suite à la présidence de Costa e Silva. Le terme « Années de plomb » est rapporté dans BISSO-SCHMIDT Benito, « “Années de plomb” : la bataille des mémoires sur la dictature civile-militaire au Brésil », dans Cahiers d’histoire. Revue d’histoire critique, n°99, Paris, Cahiers d’histoire, 2006, 172 p., pp. 85-102, [en ligne] https://journals.openedition.org/chrhc/807 (dernière consultation le 20/02/2023)

[26] Ici, la gauche comprend les communistes et les socialistes ou leurs sympathisants. Mais le terme est utilisé par la dictature dans un sens extensif pour disqualifier tout opposant.

[27] Le Brésil a également connu la vague contestataire de 1968, marquée particulièrement par une mobilisation étudiante dans les grandes villes, Rio de Janeiro en premier lieu.

[28] Ces politiques ont d’ailleurs reçu le soutien implicite des États-Unis, bien qu’elles n’aient pas été appuyées de manière aussi marquée qu’en Argentine sous la dictature de Pinochet.

[29] NEIBURG Federico, « La guerre des indices. L’inflation au Brésil (1964-1994) », dans Genèses, n°84, Paris, Belin, 2011, 176 p., pp. 25-46, [en ligne] https://www.cairn.info/revue-geneses-2011-3-page-25.htm (dernière consultation le 20/02/2023)

[30] PEREIRA DE QUEIROZ Maria Isaura, art. cit.

[31] CHIRIO Maud, « Fêtes nationales et régime dictatorial au Brésil », dans Vingtième Siècle. Revue d’histoire, n°90, Paris, Presses de Sciences po, 2006, 246 p., pp. 89-108, [en ligne] https://www.cairn.info/revue-vingtieme-siecle-revue-d-histoire-2006-2-page-89.htm (dernière consultation le 20/02/2023)

[32] Traduisible par « sesquicentenaire ».

[33] Tout art n’allant pas à l’encontre de la vision du pouvoir est autorisé. Ce qui entend également le respect des mœurs définies comme acceptables par le pouvoir politique et les censeurs.

[34] Littéralement « nouvelle vague ».

[35] TV Globo, la télévision brésilienne, fut fondée en 1965, soit un an après le coup d’État. Les chaînes subsistent encore aujourd’hui et constituent un des plus grands fournisseurs à l’échelle nationale.

[36] Ernesto Geisel préside le Brésil de 1974 à 1979. C’est à partir de son mandat que la politique répressive perd son souffle et laisse place à une ouverture progressive.

[37] En 1979, dans la région de São Paulo, près de 150 000 ouvriers métallurgistes se mettent en grève contre la politique du gouvernement militaire.

[38] NEIBURG Federico, art. cit.

[39] Autour de 1000 % d’inflation à cette époque.

[40] Les combattants sont alors autour de 5000, la plupart étant des jeunes hommes.

[41] Sous Figueiredo, le régime met en place des réformes progressives telles que la libération de prisonniers politiques, l’autorisation de nouveaux partis politiques et l’organisation d’élections.

[42] Ibid.

[43] Depuis, des efforts ont été faits pour annuler l’amnistie et poursuivre les responsables de crimes graves, mais il y a encore beaucoup de débats sur la manière de traiter le passé dictatorial du Brésil.

[44] Celui-ci meurt juste avant son investiture et est remplacé par José Sarney, premier président brésilien après la dictature.

[45] JOANA Jean et ROUQUIÉ Alain, « Amérique latine : l’état militaire à l’épreuve des transitions », dans Revue internationale de politique comparée, vol. 15, Paris, De Boeck Supérieur, 2008, 172 p., pp. 151-162, [en ligne] https://www.cairn.info/revue-internationale-de-politique-comparee-2008-1-page-151.htm (dernière consultation le 20/02/2023)

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